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mercredi 28 mars 2012

Eolien offshore : un vent nouveau sur les énergies renouvelables


Filkr Christopher Owen Jones

Il y a un mois, la France clôturait son premier appel d'offres sur l'éolien offshore. Une énergie renouvelable dont elle attend beaucoup pour atteindre les objectifs fixés en la matière par le Grenelle de l'environnement. Mais le manque de recul sur cette technologie, son prix et ses impacts laissent de nombreuses incertitudes sur l'avenir de cette filière encore balbutiante.


Avec l’éolien offshore, un vent nouveau souffle ces derniers mois sur les énergies renouvelables en France. L’ADEME estime à 30 GW le potentiel de production des côtes dont la France est largement pourvue : de quoi aider l’Hexagone à atteindre son objectif de 23% d’électricité d’origine renouvelable d’ici à 2020. Avec en prime, un effet favorable sur la réduction des gaz à effet de serre. Car le gouvernement l’assure : « Sur 20 ans d’exploitation, la production d’un parc éolien offshore est nette de toute empreinte carbone pendant 19 ans ». L’ambition est donc d’installer 6 GW soit 1200 éoliennes produisant 3,5% de l’électricité française d’ici à 2020. D’où un premier appel d’offres lancé en juillet dernier et clos le 11 janvier dernier sur 5 sites prédéterminés* pour une puissance de 3 GW. Trois consortiums y ont répondu**. Ils seront évalués par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) sur trois critères principaux : le prix de rachat proposé, le volet industriel et la prise en compte de l’environnement. Autant de défis à relever pour assurer un avenir à cette filière.


Quel prix de rachat pour être rentable ?
Le coût de production de l’électricité d’une éolienne offshore est difficile à évaluer car il dépend des conditions d’installation de chaque parc (profondeur, distance des côtes etc.).  L’appel d’offres prévoit l’attribution d’un nombre de points maximal si les postulants parviennent à proposer un coût de rachat de l’électricité le plus faible possible.  Le prix d’achat fixé actuellement par EDF pour 20 ans est de 13 centimes d’euros le kWh les 10 premières années et entre 3 et 13c d’euros les 10 années suivantes. Cela sera-t-il suffisant pour couvrir les investissements ? « Compte tenu de la maturité des technologies, ce niveau de tarif reste encore insuffisant pour garantir la rentabilité des parcs éoliens », précise la note sur l’éolien du Ministère de l’Ecologie. Elle ajoute néanmoins que d’ici 2020, grâce aux innovations technologiques, le coût de production pourrait baisser de 15 à 20%.
Ce prix de rachat nécessitera pourtant déjà un effort de l’Etat qui prévoit que « le surcoût de l’électricité produite par les éoliennes sera compensé par la contribution publique au service de l’électricité ». Concrètement, les ménages français devront mettre 25 euros de plus par an sur la table pour financer la filière, soit 4% de la facture des ménages en 2020. Pour la Fédération Environnement Durable (FED), qui regroupe plus de 700 associations contre l’éolien, avec un coût de production multiplié par 5 (du fait des différentes subventions publiques) ceci entrainera plutôt une hausse de la facture des ménages de 120€/an soit  près de 13%.
Et après les 20 ans de contrat ? « Nous ne sommes plus assurés de vendre l’électricité à prix fixe, on la vendra certainement au prix du marché. Il est donc difficile de savoir ce que cela rapportera », explique Jean Christophe Chomette, directeur d’Iberdrola France. D’autant que les industriels ont du mal à évaluer la maintenance qu’il faudra engager en mer dans des conditions plus difficiles que sur terre. Areva assure que ses éoliennes résisteront au moins 20 ans.  Mais qu’en sera-t-il ensuite ? Faudra-t-il démanteler ou poursuivre l’exploitation ?


Une filière industrielle pourvoyeuse d’emploi ?
Si le gouvernement mise sur la filière, c’est qu’elle pourrait aussi permettre de créer 10 000 emplois pour un investissement industriel de 10 milliards d’euros. La France souhaiterait même profiter du développement de cette énergie renouvelable dans toute l’Europe pour devenir un champion de cette filière industrielle. Mais pour les opposants, il y a fort à parier qu’à l’image de l’éolien terrestre, des entreprises étrangères remporteront leur part du gâteau comme l’Allemand Eon ou le Danois Vestas, qui bénéficie de 20 ans d’expérience dans le domaine. « La France n'est pas la plus performante dans le domaine des éoliennes industrielles. », expliquait à ce sujet en mai dernier Jean-Louis Bultré et Hervé Texier, président et vice-président de la FED dans une tribune sur le site de l’Expansion.
Areva, partenaire tantôt d’Iberdrola, tantôt de GDF Suez, a cependant déjà prévu la construction d’une usine au Havre pour la fabrication des éoliennes. 700 emplois directs devraient être créés et l’entreprise prédit l’installation d’autres PME dans la zone. Mais si Areva échouait sur certains appels d’offres, cette perspective serait-elle remise en cause ?  La société balaye d’un revers cette crainte : «  La pérennité d’une usine en France se justifie avec les perspectives Outre Manche. En Angleterre, ce sont des projets pour 20 000 MW d’ici 2020 qui sont prévus », s’enthousiasme Philippe Kavafyan.  Le directeur d’Areva Wind y voit un potentiel de 1200 éoliennes à construire pour Areva afin d’appuyer les industriels étrangers et assure que l’éolien maritime nécessite des infrastructures de construction à proximité des parcs. « Areva s’engage à ce que 80% des heures travaillées pour la construction des éoliennes le soient en France. Il y a de vraies retombées en termes d’emploi contrairement au terrestre, où la valeur ajoutée en France n’est que de 20 à 25% » ajoute-t-il.


Quel impact environnemental pour le littoral français ?
Dans sa brochure technique sur l’éolien, l’ADEME le rappelle que « la phase de construction d’un parc éolien en mer peut avoir des impacts potentiellement négatifs sur l’environnement, notamment sur les mammifères (cétacés, phoques) et les poissons. ». D’après l’organisme, les études déjà réalisées sur les installations au Danemark et au Royaume Uni révèlent que les impacts restent limités lorsque des mesures d’atténuation sont prises. « De nombreuses études existent en Europe du nord, mais encore aucune en France où les côtes sont très différentes. Il faudra étudier les parcs au cas par cas », explique Adeline Mathien, chargée de mission énergie à FNE. La seule zone « en avance » sur le sujet est celle du Tréport. Mais l’étude d’impact qui a déjà été présentée lors de réunions publiques ne satisfait pas encore les associations.
L’appel d’offre prévoit d’évaluer en 20 points (sur 100 au total) « les mesures retenues pour prendre en compte au mieux les usages existants et l’environnement ».  Si les consortiums doivent s’engager à limiter au maximum leur emprise géographique et présenter un plan de démantèlement du site après exploitation, l’appel d’offre ne prévoit pas pour l’instant d’étude approfondie des impacts environnementaux mais plutôt l’établissement d’une « note d’évaluation ». « Nous en sommes au stade de pré-étude de 6 mois exigée par l’appel d’offres. Il prévoit ensuite 18 mois pour tester nos solutions : nous ferons donc des mesures plus approfondies à ce moment là », explique-t-on chez Eole RES. Les résultats de l’appel d’offres sont prévus le 29 mars. On devrait alors voir se dessiner les principales pistes de développement de cette filière.
* : les cinq sites retenus sont : Le Tréport, Fécamp, Courseulles-sur-mer, Saint Brieuc et Saint Nazaire.
** : EDF en partenariat avec Alstom, GDF Suez en partenariat avec Areva pour 3 sites et avec Siemens pour un site et enfin un étranger Iberdrola producteur d’énergie espagnol avec Eole-RES et Areva.
Pauline Rey-Brahmi

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